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- Écrit par fredo
- Création : 28 août 2011
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Participant : Fredo
Depuis quelques temps, l'envie d'effectuer un ironman (enchainer 3,8km de nage en eau vive, 180km de velo puis un marathon de 42,195km à pied), la plus longue épreuve existant en triathlon, me chatouillait, j'étais donc inscrit cette année à Salou début juin en Espagne et m'était préparé pas si mal, mais une sale chute en VTT 3 semaines avant m'avait laissé forfait avec une clavicule cassée.
Du coup, je me suis inscrit mi-juillet par defi sur une épreuve de rattrapage : Embrun ou l'ironman en montagne le 15 aout, réputé comme étant un des plus durs du monde (au programme prévu, nage de nuit, les 188km de velo comportent 5000m de D+ et le marathon 700m de D+, le tout entre 1000 et 2400m d'altitude)
Me voila donc parti dimanche 14 aout aux aurores (apres 4h de sommeil suite soirée cremaillère chez Orel, qui surveillera la course depuis sa montagne... table au belvedere d'Embrun).
Première expérience pour moi de distance Ironman, c'est un gros defi avec la preparation minimaliste du à ma clavicule cassée en mai et une infection pulmonaire sévère (legionnelose) fin juillet.
Recupération dossard, depot du velo dans un parc qui me semble immense (948 concurrents au depart), un petit verre de l'amitié offert par l'organisation, puis retour camping pour installation tente et une pasta party maison sur le rechaud (et un petit verre de pineau pour se donner du courage )... puis au dodo à 22h en n'oubliant pas de mettre le reveil à 4h30. Je saurais pas trop dire combien d'heures j'ai dormi mais la tension et les orages m'ont souvent tenu eveillé... Un petit dej constitué de 3 barres energetiques que je me force à avaler puis direction le parc à velo en voiture (4km entre le camping et le site, c'est court en temps normal, mais là il faut prevoir de pouvoir rentrer le plus facilement possible).
J'enfile ma combi, fini d'installer mes affaires ramenées le matin car la nuit a été parsemée d'orages, la météo est annoncée caniculaire... car c'est aussi çà Embrun, au delà de la difficulté de l'épreuve, la météo est toujours un facteur capricieux qui fait extremement mal aux organismes... violents orages l'an dernier, neige et grele il y a 2 ans, canicule il y a 3 ans... il est 5h50, la nuit est noire profonde et je suis pret même si je ne m'echaufferais pas dans le port, trop tard mais beaucoup ont fait pareil preferant dormir que s'echauffer.
6h00, la corne de brume retentit dans la nuit, une immense meute de pres de 1000 triathletes entre dans l'eau... devant je ne vois rien, pourtant les bouées sont censées être éclairées. Je pars très doucement mais me rend compte d'un sacré problème, mes lunettes ont toujours un peu de buée, de jour c'était pas genant, mais de nuit, c'est la merde et je vois toujours pas les bouées, bref je me mets en brasse, j'enleve les lunettes, ok là je les vois... du coup j'utilise cette technique tout le long en nageant 100 ou 200m en aveugle puis brasse et sans lunettes pour m'orienter, je perds du temps, mais je nage pas si mal... c'est long et le jour se leve quand je dois être vers 3km, je sors de l'eau en 1h20, soit le 823° temps nat, bon je tablais plus sur 1h10 - 1h15, mais je me plains pas vu la difficulté à m'orienter de nuit.
T1 (transition nage-vélo), je prends le temps d'uriner, me doucher, me secher, bien m'habiller et manger un gel. Je sors relativement vite du parc en 6 min pour un velo qui s'annonce épique (5000m de D+ annoncés, au ressenti je dirais plus entre 4000 et 4500), il doit dejà faire près de 20°C
Vélo, je dois donc boucler mon velo en moins de 9h45 si je veut rentrer dans les barrières horaires. Dès le début, une montée assez seche (7-8%) vers les Puys calme toute velléité et rappelle à l'extreme prudence. Je vois dejà des personnes qui sont comme moi en queue de peloton et qui passe dejà çà en danseuse... je me dis qu'ils sont soit très forts, soit mal barrés. Je monte très tranquille, me rajoutant souvent des dents plus que ce que je trouverais normal de mettre aux sensations (j'ai fait mettre un 34x28, bien m'en a pris). Un premier coup de chauffe vers le km 20, une rampe de 200m à environ 15-16% que je suis obligé de passer mi-assis, mi-danseuse. Les km passent sur un parcours toujours très bosselé, il n'y a pas de vent mais de plus en plus la temperature s'eleve... difficile d'evaluer la temperature avec le vent relatif du velo. J'ai fini au pied de l'izoard (80km) mes 2 bidons de 800ml avec malto et me rabat sur les bidons d'eau pris à la volée (environ un ravito tous les 15km). Je m'oblige à boire toutes les 10min et je mange une barre ou un gel toutes les heures (plus quelques bananes pris à la volée sur les ravitos). L'izoard (Hors categorie) commence doucement (6 à 8%) puis à la sortie de Brunissard, un premier mur de presque 1km à 10-11%, je vois les premiers cyclistes qui s'arretent victimes de crampes, ils sont mal barrés. Je slalome un peu, plus pour m'economiser que par necessité, puis toute la fin du col est soutenue sans être monstrueux (entre 7 et 9% tout le long) et une foule digne d'une étape de tour de France vous encourage dans les lacets, mais je double pas mal de cyclistes en souffrance dans cette portion (dont une dizaine finissant en poussant le velo). Une grosse pause de plus de 5min au col de l'izoard pour manger, boire et me mettre un journal me fait du bien avant d'attaquer la grosse descente qui m'effraie, je suis un très mauvais descendeur, je descends donc entre 50 et 55 km/h, monte même à 60 mais me fais très peur au virage suivant. Au final, çà c'est plutot bien passé et je vois dans les replats que j'ai toujours des jambes, les voyants sont au vert... à la fin de la descente vers Briançon, on attaque le retour, mais le vent s'est levé pendant la descente, de face bien sur, sinon c'est pas drole... reste encore 40-50 km, là c'est l'inconnu devant moi (plus longue sortie vélo solo de 140km jusque là). Un montée un peu raide mais qui passe bien aux Vigneaux, mais vers le km 140, me voilà au pied de la côte de Pallon (1° catégorie), ou plutot du mur de Pallon... 2km à 13%, beaucoup la monte a pied, moi je slalome sur toute la largeur de la route et serre mechamment les dents mais fini par arriver en haut, là çà touche serieusement les bords il me faut 10km tranquilles pour retrouver un peu mes jambes même si des douleurs commencent à apparaitre au niveau des genoux et des doigts de pied. Encore et toujours des bosses, toujours vent de face... pfff, çà devient très dur, je suis rincé et cette chaleur est dure à supporter (je m'asperge à tous les ravitos)... arrive le panneau Embrun km 178, reste donc plus que la côte de Chalvet, celle que les cyclistes appelle "la bête" et je leur donne raison 5km à environ 9% (1° catégorie) après tout ce que l'on vient de passer, là c'est plus que du mental, plusieurs fois je suis sur le point de craquer et de poser pied à terre, mais je m'accroche rageusement et fini par passer, je suis obligé de faire une pause au ravito en haut de la cote tellement j'en peux plus en arrivant...5km d'une descente très prudente (pas mal de gravillons et mes jambes ne sont que souffrance) puis me voilà à la ligne du parc à velo. Je descend, serre les dents pour pas crier en posant le pied par terre, puis clopin-clopant, je met bien 3 min à rejoindre mon emplacement... et dans sa tete, il faut accepter l'idée de partir pour un marathon. Je pose donc le velo en 9h02, soit le 785° temps velo et j'ai repris 20 places
T2 (transition vélo-course à pied), une charmante jeune fille me propose de me masser les jambes, çà prends une min, mais çà me fait du bien... je me change, prend le buff des raids pour eviter l'insolation, vais faire pipi (et realise que j'ai bu des litres d'eau avec un seul pipi sur le velo, çà donne une bonne idée de la transpiration, 7min et c'est donc reparti.
Marathon, je pars en courant comme je peux sur les 3 premiers km (environ 10km/h), puis les bosses commencent, punaise que le marathon est dur (au final il doit bien y avoir 800 à 1000m de D+ sur le marathon), je marche systématiquement dans les montées et je suis vraiment en surchauffe même si je sens mes jambes revenir pas si mal assez vite. Il y a des ravitos et/ou fontaines tous les 3km environ et j'imbibe systematiquement et abondamment le buff, mais il fait tellement chaud qu'il est completement sec en moins d'un km, je pense qu'il doit faire 30°, c'est horrible, tous les visages autour de moi sont des masques de souffrance, je souffre moi aussi et vois même des points blancs 2-3 fois (quelques min de marche me font revenir à chaque fois). Un gros mental, de la patience et les nombreux encouragements de la foule nombreuse me permettent de tenir et d'avancer. Je passe au semi en 2h30 et vers le km 28, le soleil passe derrière la montagne et la temperature descends assez rapidement, donc je me sens mieux et j'arrive à accelerer autour de 11km/h. Passé le 30°km, j'arrive plus a manger que des gels (j'en avais pris 3 avec moi, sage precaution, le solide passe plus et me donne la nausée. le soleil est couché vers 21h15 et je finis donc les 3-4 derniers km de nuit, mais là de toute manière je sens que c'est gagné et j'en remet une craquée en mode guerrier pour monter à presque 12km/h sur la fin roulante, je double les concurrents par paquets, beaucoup marchent. J'accelere encore en arrivant sur le ponton à 1,5km de l'arrivée. Au debut de la dernière ligne droite, à environ 400m de l'arrivée un type lance un sprint à environ 15km/h au moment où il me voit arriver, du coup je debranche completement les fils, le rattrape en environ 200m en montant à 17-18km/h et franchit la ligne en trombe sous la bronca de la foule très nombreuse qui apprecie ce genre de finish, je suis aux anges, quelle course, quelle arrivée, puis quelques secondes après une violente nausée remonte suite au sprint et je me pousse de quelques metres sur le côté pour vomir... puis, on me passe la medaille, me donne un tee-shirt finisher... les emotions sont indescriptibles ! Je finis donc mon marathon en 4h56 (negative split quand même) soit le 414° temps et j'ai gagné 174 places sur la course à pied. Au final j'ai donc mis 15h34 pour boucler cette course hors normes à la 629° place sur 800 finishers.
En conclusion, Embrun merite vraiment sa réputation de course extremement difficile et il est absolument necessaire de partir avec un petit braquet velo.
La petite bière de recup' est bien méritée !!
Commentaires
Gros mental de commencer un iron man à l'aveugle sans jeter l'éponge (et les lunettes)
Seb
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